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Page:Langlois - Rig Véda.djvu/105

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[Lect. VI.]
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RIG-VÉDA. — SECTION PREMIÈRE.

3. Ouvrières diligentes, elles couvrent au loin (le monde) d’un même réseau lumineux, et apportent l’abondance à l’homme pieux et libéral, qui n’épargne ni les sacrifices ni les libations.

4. Comme la danseuse, l’Aurore révèle toutes ses formes ; elle découvre son sein, comme la vache découvre sa mamelle féconde ; et, de même que celle-ci donne son lait, l’Aurore distribue au monde entier sa lumière en dissipant les ténèbres.

5. Ses lueurs éclatantes se distinguent ; elle s’avance par degrés, et met en fuite l’obscurité. Elle illumine sa forme, comme (les prêtres) au moment du sacrifice illuminent le bûcher; et la fille du ciel donne à ses clartés des teintes variées.

6. Nous venons de traverser l’océan de cette nuit. L’Aurore se lève, elle ramène la vie. Telle qu’un seigneur puissant, elle brille et sourit, belle, bienveillante, ennemie (des ténèbres) pour notre bonheur.

7. Fille du ciel, elle resplendit et inspire l’hymne sacré. Elle est, pour les fils de Gotama, un objet de louanges. Aurore, tu donnes une opulence qui peut s’enorgueillir de ses enfants, de ses serviteurs, de ses chevaux, de ses vaches !

8. Aurore, puissé-je obtenir cette abondante richesse que relèvent la gloire et le nombre des enfants, des serviteurs, des chevaux ! (déesse) éclatante et fortunée, qui produis la fertilité, et qui brilles d’une gloire merveilleuse !

9. La déesse, poursuivant sa marche, et d’un large regard embrassant tous les mondes, luit et fait lever tout ce qui respire. Vers elle monte la voix de tous les êtres intelligents.

10. Antique, renaissant chaque jour, elle brille constamment des mêmes couleurs ; mais aussi, telle qu’une chasseresse qui frappe et abat les habitants de l’air, l’Aurore attaque la vie des mortels.

11. La voilà qui ouvre les portes du ciel, et force (la Nuit) sa sœur à se cacher. Elle consume les âges de la vie humaine, et se colore des feux du (Soleil) son amant.

12. Comme (le berger répand) ses troupeaux (dans la plaine), la belle déesse répand (ses rayons dans les champs de l’air) ; telle qu’une mer profonde, elle remplit tout de sa grandeur. Elle maintient les œuvres divines du soleil, et se pénètre de ses rayons, qu’elle reflète.

13. Aurore, toi que nous honorons par nos offrandes, apporte-nous cette variété de biens qui nous permette d’élever nos fils et nos petits-fils.

14. Brillante Aurore, toi que célèbrent nos hymnes, toi qui es riche en vaches et en chevaux, lève-toi aujourd’hui pour notre bonheur.

15. Aurore, toi que nos offrandes honorent, attelle aujourd’hui tes coursiers rougeâtres, et apporte-nous toute espèce de prospérités.

16. Ô Aswins, couple secourable, dirigez votre char vers notre demeure, où règnent la richesse de l’or et la fécondité des vaches !

17. Ô Aswins, vous qui, pour le genre humain, amenez la lumière au ciel et donnez le signal de l’hymne sacré, apportez-nous l’abondance !

18. Dieux secourables et bienfaisants, montés sur un char d’or, que (vos coursiers), éveillés par l’Aurore, vous amènent à nos libations !


HYMNE XIII.

À Agni et à Soma, par Gotama.

(Mètres : Anouchtoubh, Trichtoubh, Djagatî et Gâyatrî.)

1. Agni et Soma[1], (dieux) bienfaisants, écoutez mon invocation. Agréez mes prières, soyez bons pour votre serviteur.

2. À celui qui vous adresse aujourd’hui cet hymne respectueux, accordez, Agni et Soma, une heureuse abondance de serviteurs, de vaches, de chevaux.

3. Agni et Soma, que pendant toute sa vie il possède une grande force et une belle famille, celui qui vous honore par ses invocations et ses holocaustes !

4. Agni et Soma, on connaît votre puissance. Elle a éclaté, quand vous avez enlevé à Pani les vaches (célestes) dont il était le gardien[2] ; quand vous avez donné la mort au fils de Brisaya[3], et que vous avez fait briller pour tous la lumière unique (du soleil).

5. C’est vous, Agni et Soma, qui, unissant vos efforts, avez placé au ciel[4] ces (astres) étincelants ; vous, Agni et Soma, qui avez délivré les fleuves enchaînés de l’odieuse imprécation lancée contre eux[5].

  1. Ces deux divinités sont unies sous le nom d’Agnichoma, qui résume ainsi l’idée des deux principes humide et igné. La libation et le feu, ce sont là les deux éléments du sacrifice.
  2. Voy. p. 44, col. 1, note 7.
  3. Le commentateur fait venir le mot Brisaya de brisi, qui, suivant lui, signifie vêtement. Ce serait le même sens que celui qu’on donne au mot Vritra.
  4. Le sacrifice amène la pluie, et rend au ciel sa sérénité ; c’est le sacrifice qui, le matin, allume les feux d’Agni sur la terre, et les feux du Soleil au ciel.
  5. Les pluies obtenues par la vertu des sacrifices rendent aux rivières les eaux dont elles étaient privées par une espèce de fatalité. Cette idée n’est pas assez simple pour le légendaire, qui dira qu’Indra, en donnant la mort à Vritra, qui est un fils de Brahmane, a encouru l’imprécation lancée contre quiconque commet un crime pareil ; il impute sa faute à toute la nature, qui a besoin d’être purifiée par Agni et Soma, c’est-à-dire par le sacrifice.