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[Lect. VI.]
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RIG-VÉDA — SECTION SEPTIÈME.

(sacré), j’invoque dans cette cérémonie Vivaswân[1], qui est ton père.

6. Nous avons parmi nos Pitris les Angiras, les Navagwas[2], les Atharwans, les Bhrigous, les Somyas[3]. Puissions-nous obtenir leur bienveillance, leur heureuse protection !

7. (Ô trépassé)[4], viens ici, viens par les voies antiques où nos pères ont passé avant nous. Regarde ces deux rois, Yama et le divin Varouna, qui se réjouissent de notre Swadhâ.

8. Viens avec les Pitris, avec Yama, sur ce siége élevé que dresse la Piété. Tu as dépouillé toute impureté ; entre dans cette demeure, et revêts-toi d’un corps brillant.

9. Allez donc, ô Pitris ! dispersez-vous ; agissez chacun de votre côté. Une place a été disposée pour lui. Yama permet que le trépassé descende jouir des libations du matin et du soir.

10. Arrive par une heureuse route vers ces deux chiens enfants de Saramâ[5], aux quatre yeux, au (poil) fauve. Viens avec Yama près de ces Pitris généreux qui font la joie de nos assemblées.

11. Ces chiens, ô royal Yama, sont à toi ; défenseurs fidèles, ils ont quatre yeux, observent la route et surveillent le sacrifice. Donne-les pour garde à celui (qui vient) ; qu’il soit par toi exempt de maux.

12. Ces deux messagers d’Yama ont de larges naseaux, une respiration forte, une grande vigueur ; ils s’élancent à travers le monde. Qu’ils nous donnent aujourd’hui la vue du soleil et un souffle fortuné.

13. Répandez la libation en l’honneur d’Yama ; offrez-lui l’holocauste. Le Sacrifice, qui prend Agni pour messager, se pare et se présente à Yama.

14. Venez et apportez à Yama l’offrande du ghrita. C’est lui qui parmi les dieux peut nous donner une longue vie.

15. Offrez au royal Yama un holocauste aussi doux que le miel. Que notre hommage s’adresse aussi aux premiers, aux anciens Richis qui nous ont ouvert la route.

16. Pendant les Tricadrous[6], Yama est célébré sur sept larges mesures, telles que le Trichtoubh et la Gâyatrî. Tous nos chants sont pour lui.


HYMNE X.
Aux Pitris, par Sankya, fils d’Yama.
(Mètres : Djagatî et Trichtoubh.)

1. Que les Pitris des trois ordres[7], que les Pitris Somyas se lèvent. Leur âme a été généreuse ; ils ont connu les sacrifices. Qu’ils nous conservent au milieu de nos invocations.

2. Nos hommages s’adressent aujourd’hui aux Pitris anciens, aux Pitris plus modernes, à ceux qui se placent au foyer terrestre, à ceux qui séjournent au sein des races généreuses.

3. J’honore les Pitris bienveillants, qui sont nés sous les pas de Vichnou. Qu’ils arrivent surtout, ces Barhichads[8], qui aiment la Swadhâ de nos libations.

4. Ô Pitris Barhichads, nous vous appelons à notre secours. Réjouissez-vous de l’holocauste que nous vous offrons. Accordez-nous une heureuse protection. Éloignez de nous le malheur et le péché.

5. Que les Pitris Somyas, invoqués par nous, viennent avec joie s’asseoir sur notre gazon. Qu’ils nous écoutent, qu’ils nous répondent, qu’ils nous conservent.

6. Soit que vous vous mettiez à genou, soit que vous marchiez par la droite, agréez tous notre sacrifice. Ô Pitris, ne nous faites aucun mal : nous n’avons péché que par la faiblesse de notre humanité.

7. Asseyez-vous (sur notre gazon) au lever des brillantes (aurores), et donnez la richesse au ser-

  1. Vivaswân est ici Agni, le sacrificateur (Yadjamâna). Après le sacrifice vient le repos (Yama). Or le poëte indien donne le nom d’enfant à l’être qui succède à un autre. Yama est donc fils de Vivaswân.
  2. Voy page 80, col. 1, note 6.
  3. Voy. Lois de Manou, liv. III, st. 199. C’est-à-dire amis du soma.
  4. Cet hymne me paraît un hymne funèbre de commémoration, dans lequel l’âme du mort est invitée à venir au Srâddha. Le commentaire dit qu’elle est appelée vers le bûcher (dahanasthânam). Voy. plus bas l’hymne xi.
  5. Saramâ, comme nous l’avons vu, est la Prière, représentée sous la forme d’un chien qui aboie le matin. Plus haut, p. 504, col. 2, note 1, nous pensions que le chien, dont il y était question, était le mortier retentissant, dont la Prière éveille et anime le bruit. Maintenant ces deux chiens d’Yama ne seraient-ils pas aussi les deux pièces d’un pressoir ou d’un mortier carré ? Les poëtes font souvent mention de ces deux pièces, dont le son appelle au sacrifice. Le commentaire y voit deux chiens qui mordent les morts (prétasya bâdhacô).
  6. Genre de sacrifices, au nombre de trois ; ainsi s’explique le commentaire (Djyotis, Goh, Ayous).
  7. Le poëte reconnaît trois ordres de Pitris, inférieurs et supérieurs, et Pitris du milieu.
  8. Voy. Lois de Manou, liv. III, st. 196. C’est-à-dire assis sur le gazon.