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Page:Lanson - Boileau, 1922.djvu/158

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BOILEAU.

même avant les Fables, pour nous garantir qu’il a connu le charme de la vraie simplicité : il se sert des mêmes termes presque que Mme de Sévigné pour caractériser la poésie du bonhomme. L’élégance qu’il exigeait, et la noblesse, il les trouvait dans Joconde.

Enfin, il faut nous arrêter à deux ou trois passages très significatifs de sa traduction du Traité du Sublime et de ses Réflexions sur Longin. Le mot de sublime dans la bouche d’un homme du xviie siècle, nous semble, de prime abord, devoir représenter ce que l’éloquence et trop souvent la rhétorique ont de plus solennel et retentissant. Nous serons donc bien surpris si nous regardons où Boileau découvre du sublime. Le fameux morceau de la Première Philippique, où Démosthène montre les badauds d’Athènes allant aux nouvelles sur la place publique et se communiquant tous les « racontars » sur les projets et la santé de Philippe, c’est ce qu’il y a « de plus simple, de plus naturel et de moins enflé » ; et cependant « qui est-ce qui n’en sent point le sublime ? » Sublime aussi, cette phrase d’un plaidoyer de Démosthène : « Tantôt il le frappe comme ennemi, tantôt pour lui faire insulte, tantôt avec les poings, tantôt au visage ». Mais par où donc sublime ? Par l’emploi des termes propres et simples. Enfin, voici le passage décisif, et qui ne laisse subsister aucun doute :

Les grands mots, selon les habiles connoisseurs, font en effet si peu l’essence entière du sublime, qu’il y a même dans les bons écrivains des endroits sublimes dont la grandeur vient de la petitesse énergique des paroles, comme on