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Page:Lanson - Boileau, 1922.djvu/85

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LA CRITIQUE DE BOILEAU.

ou en prose semblaient appeler leurs noms ou se prêter à les recevoir, de leur régler leur compte en deux mots, et de façon qu’ils lui en redevaient encore.

Cependant il usa d’un procédé violent, et toujours fâcheux à employer dans une querelle littéraire, contre le plus modéré, le plus estimable de ses ennemis, contre Boursault. Il obtint en effet un arrêt du Parlement pour interdire aux comédiens du Marais de représenter une Satire des Satires que Boursault leur avait donnée. Après ce précédent fourni par Boileau lui-même, comment blâmer Chapelain d’avoir intrigué auprès de Colbert, et fait retirer au « satirique effréné » le privilège qu’il avait « extorqué » pour l’impression de ses Satires. Sans trop en vouloir au bonhomme, puisqu’enfin les meilleurs en ce temps-là ne sentaient point ce qu’il y a de misérable à provoquer une intervention de l’autorité en pareille matière, remarquons seulement qu’il n’était point si « bonhomme ». Toutes ses vertus et ses complaisances étaient conditionnées : il leur fallait des louanges pour s’épanouir. Mais cet « excuseur de toutes les fautes » avait la dent mauvaise et la rancune tenace quand une fois on lui avait manqué. Il ne s’amusait pas à la bagatelle, à écrivailler, à rimailler contre l’adversaire : à peine fit-il un méchant sonnet contre Despréaux. Il allait droit aux effets : il dressait ses listes d’auteurs à gratifier, qui sont exactement un catalogue de ses amitiés et de ses haines. Ou bien il sommait M. de Lamoignon de