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Page:Lanson - Boileau, 1922.djvu/87

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LA CRITIQUE DE BOILEAU.

passion et sa vie. Comme il ne pouvait souffrir les mauvais ouvrages, il en voulait aussi aux auteurs qui jetaient du discrédit sur la littérature par leurs mœurs et par leur caractère. Faire profession de littérateur, c’était pour lui faire profession d’honnêteté, de vie sérieuse et digne : et autant que la poésie de ruelle et de taverne, il détestait les poètes parasites et débraillés, les mendiants et les ivrognes. Bourgeois encore en ceci, il rejetait également la domesticité et la vie de bohème, et c’était pour rappeler les écrivains au sentiment de leur dignité, qu’après certains traits des Satires il écrivait, sans nécessité apparente, le quatrième chant de son Art poétique.

Mais, peut-on dire encore, est-ce user comme il faut de la critique que d’assommer les gens sans en dire la raison. Il se moque de Pelletier ou de Perrin : très bien ; mais qu’y trouve-t-il à reprendre ? Il ne daigne pas le dire, et c’est ce qu’il importerait à savoir. Ne nous arrêtons pas aux apparences. Il est très vrai que Boileau ne motive pas toujours toutes ses condamnations, et qu’il fait plus d’une exécution sommaire. Cependant, quand on l’a lu, ne sent-on pas bien la raison générale et commune de tous ces jugements particuliers ? Et ce n’est guère que le fretin qu’il dépêche ainsi sans autre forme de procès ; quand il rencontre un auteur de marque, un chef de file, type d’un genre, ou représentant d’une classe, ne dit-il pas bien nettement ce qu’il y blâme ? et doutons-nous qu’il condamne Chapelain pour sa dureté laborieuse, Scudéry pour sa fécondité stérile,