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molière.

L’École des femmes déchaîna contre lui des haines furieuses de gens de lettres et de comédiens ; rien ne fut épargné en lui, ni l’auteur, ni le comédien, ni l’homme. On l’accusa de n’être qu’un farceur, un plagiaire : on l’accusa d’indécence, d’impiété, d’inceste. Il fit tête bravement. Mais à peine est-il sorti de cette bagarre, que le Tartufe soulève tous les dévots, vrais et faux, jésuites et jansénistes, chrétiens rigoristes et auteurs jaloux : par le Don Juan, Molière jette imprudemment de l’huile sur le feu. Le roi l’abandonne avec bienveillance. À sa mort, les passions ne désarment pas : on a peine à obtenir la permission de l’ensevelir.

Au milieu de ces luttes, il lui faut faire vivre sa troupe, amuser le roi : il est directeur, comédien, auteur : il va figurera Versailles, à Saint-Germain, à Chambord, dans les ballets ; il joue à Paris dans ses pièces, dans celles des autres auteurs, dans des tragédies : et parmi cette agitation, parmi ces multiples et accablantes occupations, il écrit en treize ou quatorze ans près de trente pièces, dont beaucoup sont en cinq actes, et beaucoup, grandes ou petites, des chefs-d’œuvre.

Cependant sa vie intime était douloureuse : un mariage disproportionné, où la femme était trop jeune et légère, le mari trop épris et trop occupé, l’empoisonna d’inquiétudes et d’amertume. Il souffrit profondément : mais il n’était pas sentimental, bien que sérieux et mélancolique. De sa vie intérieure comme de sa vie

    1670 parait le pamphlet d’Elomire hypocondre, par Le Boulanger de Chalussay. En janvier 1671, Psyché, tragédie-ballet avec Corneille, Quinault et Lulli. Puis les Fourberies de Scapin (mai 1671) ; la Comtesse d’Escarbagnas (déc. 1671, à Saint-Germain, dans le Ballet des ballets ; juillet 1672, à Paris) ; les Femmes savantes (mars 1672) ; le Malade imaginaire (1673) ; pendant les représentations de cette comédie, Molière tombe malade, il meurt le 17 février 1673. On l’enterre le 21, à la nuit, au cimetière. Saint-Joseph. — Éditions : 1666 (9 comédies), 1673. 1674-6 : éd. Lagrange et Vivot, 1682. 8 vol. in-12. éd. Despois et Ménard, Coll. des Grands Écrivains, Hachette, 11 vol. in-8 (le t. X contient la biographie). — À consulter : la Notice bibliogr. au t. XI de l’éd. Hachette. P. Lacroix, Bibliographie Moliéresque, nouv. éd. 1875, in-8. Moland, Molière, sa vie et ses œuvres, 2e éd. 1885. E. Soulié, Recherches sur Molière, in-8, 1863. Loiseleur, les Points obscurs de la vie de Molière, in-8, 1877. Baluffe, Molière inconnu, t. I, 1886. Chardon, Nouveaux Documents sur la vie de Molière, in-8, 1886. Bricauld de Verneuil, Molière à Poitiers en 1648, in-8, 1887. Larroumet, la Comédie de Molière, 1887. Le Moliériste, toute la collection. Moland, Molière et la Comédie italienne, 1867. Despois, le Théâtre français sous Louis XIV, in-18. Dr Nivelet, Molière et Guy Patin, 1880. H. Becque, Molière et l’École des femmes (Revue bleue, 10 avril 1886). M. Souriau, l’Évolution du vers français au xviie siècle, 1893. Ch. Comte, les Stances libres dans Molière, 1893, Brunetière Études critiques, t. 1 et IV ; Époq. du théâtre français., conf. 4 et 6. Lemaître, Impressions de théâtre, t. I, III, IV et VI. Roy, Étude sur Ch. Sorel. Mahrenholtz, Molière’s Leben und Werke, Heilbronn, 1881. Livet, Lexique de la langue de Molière, 3 vol. in-8, 1896 G. Lanson, Molière et la farce (Revue de Parts, 1er mai 1901) Gendarme de Bevotte, La légende de don Juan, 1906 Martinenche, Molière et le théâtre espagnol, 1906. K. Mantzius, Molière ; les théâtres, le public et tes comédiens de son temps, 1908. Rigal, Molière, 2 vol. 1908.