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CHAPITRE III

MONTESQUIEU


1. Les Lettres persanes. Peinture superficielle des mœurs : réflexions graves sur le gouvernement. — 2. Les Considérations : Montesquieu et Bossuet. Défauts du livre : sa portée philosophique. — 3. L’Esprit des lois : collection et chaos d’études, de recherches, d’idées. Éléments et accroissements de la pensée de Montesquieu. Contradiction du point de vue physique et de la théorie politique. Témérité des déterminations et des généralisations. Hardiesse philosophique et politique du livre. Influence de Montesquieu.

Au moment où Voltaire se fixe aux Délices, et va commencer une nouvelle vie, Montesquieu disparaît (1755). Il n’avait pas fait autant de tapage que Voltaire, il s’était moins agité : mais il avait fait plus de besogne, au point de vue de la philosophie du siècle. Rien à cette date, dans l’œuvre de Voltaire, ne saurait contre-peser les Lettres persanes, les Considérations sur les Romains, et l’Esprit des Lois : il y a là une raison qui sait démolir et construire, un esprit qui peut guider son siècle, quand Voltaire en est encore à faire des niches au gouvernement, et à faire partir des fusées pour l’amusement des badauds.

1. LES « LETTRES PERSANES ».

Les Lettres persanes[1] parurent en 1721, avec le succès que pouvaient avoir, sous la Régence, de vives satires entrecoupées des

  1. Biographie : Charles-Louis de Secondat, né à la Brède, près de Bordeaux, le 18 janvier 1689, étudia chez les Oratoriens à Juilly, fut reçu, en 1714, conseiller au parlement de Bordeaux, se maria en 1715, prit, en 1716, la charge de président et le nom de Montesquieu que lui légua un oncle. Il vint à Paris à 33 ans, après le succès