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Page:Laprade - Œuvres poétiques, Les Symphonies, 1878.djvu/217

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Mille oiseaux à l’entour, dans les sillons ouverts,
Attardés par l’appât, vont becquetant les vers.
Linot, bergeronnette et mésange hardie
Sous les pieds des taureaux courent à l’étourdie,
Voltigent sur leurs fronts, effleurent leur poitrail.
La paix règne entre tous, dans ce champ du travail.
Aux vents frais de la nuit, le bois prochain frissonne
Et jette au sillon noir l’or des feuilles d’automne.
La sorbe aux grains ambrés tremble au bout du buisson,
Le seul bruit qui domine est la vieille chanson,
La voix du laboureur, lancée à toute haleine,
Qui plane et qui s’étend jusqu’au bout de la plaine.


LE BOUVIER.

Il est noble, il s’assied près des anciens du bourg,
Le bouvier qui commande aux taureaux de labour
Domptés par sa main vigoureuse ;
De l’antique charrue il tient le gouvernail,
Et le grain sortira, fruit de son dur travail,
Du sillon large et droit qu’il creuse.

Il est vaillant jouteur du poing et du bâton ;
C’est lui qui dans la lice, aux fêtes du canton,
Lance au but les folles cavales ;
Du village ennemi son bras est redouté ;
Près de lui, beau danseur rayonnant de gaîté,
Toutes les filles sont rivales.

S’il part conscrit, bien vite il est fait grenadier.
Honneur aux hommes forts ! au solide bouvier :
Sa place est partout la première.