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Page:Laprade - Œuvres poétiques, Les Symphonies, 1878.djvu/226

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Le rameau d’or cueilli par Virgile et par Dante ;
Entre ces deux lauriers s’exerçait à choisir,
Et sur les grandes morts il pleurait de désir.

Le jour, filtrant par goutte aux voûtes des allées,
Sème de diamants les mousses constellées,
Et, jaspant de vermeil le tronc du chêne obscur,
Fait sourire, à ses pieds, la pervenche œil d’azur.
C’est midi ; la forêt croise en détours sans nombre
Ses chemins, clairs sillons tracés sous des flots d’ombre.
Au hasard l’enfant marche, absorbé tout entier
Dans son rêve sans terme ainsi que le sentier.
Bientôt avec l’odeur qui sort de chaque tige,
Il subit du printemps l’invincible vertige,
Les folles visions, voltigeant par essaims,
Rompent en lui le fil des austères desseins.
Parti du Capitole, épris des vieux trophées,
Le mobile songeur s’égare chez les fées.
Il touche à ces jardins où s’endort la raison
Sous d’attrayants rameaux dont l’ombre est un poison.
Un murmure joyeux l’invite ! il va sans crainte,
Il fait un dernier pas vers le noir labyrinthe.

Mais, tout à coup, tenant une rose à la main,
Grande et belle une femme a barré le chemin.
Au doux vent de ses pas la feuille à peine bouge,
Et s’embrase aux reflets de son vêtement rouge ;
Le concert de sa voix, des grâces de son corps,
De ce printemps perfide étouffe les accords ;
Elle parle et sourit, l’éclair de sa paupière
Brille et du ciel ardent éclipse la lumière.