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Page:Laprade - Œuvres poétiques, Les Symphonies, 1878.djvu/306

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Ainsi j’ai triomphé ; m’emparant de l’histoire,
J’y règne en dépit du plus fort.
Je m’appelle Caton… César, dans sa victoire,
César est vaincu par ma mort. »

Silence, ô rude voix de l’héroïsme antique,
Laisse une âme plus pure exhaler son cantique.
Le bûcher de Rouen, les prés de Vaucouleurs
Lancent autour de nous leurs flammes et leurs fleurs.


JEANNE d’ARC.

« Tu m’aimas d’enfance, et je viens t’apprendre
À chasser bien loin tes noirs assaillants :
Garde un esprit fier dans une âme tendre ;
Les cœurs les plus purs sont les plus vaillants.

Tu viens comme au pied d’un autel qui brille
Devant mon bûcher te mettre à genoux ;
Pourquoi, dans ton cœur, mon nom d’humble fille
Entre les plus grands est-il le plus doux ?

Si tu m’invoquas, pauvre paysanne.
Entre tous les saints de mon cher pays,
C’est qu’au fond des bois et dans ma cabane
Ces saints me parlaient, et que j’obéis.

C’est qu’à leur appel j’ai dit, sans murmure,
À ma mère en pleurs un suprême adieu.
Pour aller porter, sous ma blanche armure,
L’âme de la France et l’esprit de Dieu.