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Page:Laprade - Œuvres poétiques, Pernette, Lemerre.djvu/155

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À VERSAILLES.


Mon esprit s’éteint, mon cœur s’use
Loin de vous et loin du soleil ;
Et, certes, ce n’est pas la Muse
Qui m’ôte ainsi force et sommeil !

De l’arène retentissante
Où j’entends ces fauves clameurs,
La Muse, hélas ! est bien absente…
Ce n’est pas d’elle que je meurs !
 
Je succombe à de vieilles peines,
Aux regrets, aux espoirs trahis ;
Mon sang est sorti de mes veines
Par les blessures du pays.

Je suis las, caduc avant l’âge ;
Dieu seul pourrait me ranimer.
Mon cœur, sans lutter davantage,
N’a plus que la force d’aimer.

Les branches du vieux sycomore
Se brisent de tous les côtés,
Et mes jours, s’il m’en reste encore,
Un par un sont déjà comptés.

Que puis-je, à cette heure dernière,
Contre les destins en courroux ?…
Mais je suis toujours votre père,
Et je veux finir près de vous.

Décembre 1873.