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Page:Laprade - Œuvres poétiques, Pernette, Lemerre.djvu/197

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LE CHATEAU DE MES SONGES.

Ce que j’ai rêvé tant de fois…
Peut-être au delà de l’enfance.

Et c’est là, dans ce vieux manoir,
Près du Lignon ou de la Dore,
Que j’aime si fort à vous voir,
Chers enfants, quand je rêve encore,

Or, durant ces songes si beaux,
Dans nos brouillards toujours en cage,
Mes chers petits, mes chers oiseaux,
Nous perchons au cinquième étage !

Et, dans mon maigre testament,
Faisant à chacun part entière,
Chers petits, je ne puis vraiment
Vous laisser château ni chaumière.

Mais, à défaut de la maison
Qui jamais, hélas ! ne s’achève,
Près de quitter vie et prison,
Amis, je vous lègue mon rêve :

Ce grand manoir sur les sommets
Devant qui tout n’est que masure,
Où nos cœurs unis à jamais
S’aimeront sans fin ni mesure ;

Ce jardin, là-haut, dans le bleu
Fleuri de soleils et d’étoiles,
Où nous verrons tous le bon Dieu
Sans plus de crainte et plus de voiles.