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Page:Laprade - Œuvres poétiques, Pernette, Lemerre.djvu/268

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LE LIVRE D’UN PÈRE.


Jadis, enfant, assis sur ces bancs où vous êtes,
Entre ces mêmes murs où nous menons un deuil,
J’entendais des récits de gloire et de conquêtes,
Et ce doux nom de France était tout mon orgueil.

Épris d’elle et d’Athène, et de Sparte et de Rome,
Je pleurais sur Caton et sur Léonidas.
Ces pleurs m’ont fait poète et m’ont fait honnête homme :
Amis, vous serez plus… vous serez des soldats !

Depuis ces quarante ans, la lyre s’est trompée
En nous prêchant l’amour de nos voisins jaloux.
Réparez son erreur, enfants, à coups d’épée.
Vous aimerez après… mais, d’abord, vengez-nous.

Français, rien que Français, n’aimons plus que la France :
Sur nous, sur notre sang elle seule a des droits ;
Dans ces seules vertus plaçons notre espérance,
Et n’attendons plus rien des peuples et des rois.

De nos moindres soldats honorons la mémoire :
Ils sont morts sans prétendre à devenir fameux ;
C’est assez pour forcer quelque jour la victoire
D’obéir, de combattre et de mourir comme eux.

Savez-vous bien, amis, devant ces funérailles,
Pour vous, objets sacrés de nos plus chers souhaits.
Pour vous nos fils, pour vous le sang de nos entrailles.
Le destin que je rêve et le vœu que je fais ?

Je le fais pour nous tous, vieillards ou jeunes hommes,
Et tous à l’accomplir tenons-nous préparés !