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Page:Laprade - Œuvres poétiques, Psyché, Lemerre.djvu/351

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HARMODIUS.

J’accepte le trépas, s’il délivre ma ville ;
Ilion n’est tombé qu’après celui d’Achille ;
Et des dieux, pour son peuple, un homme obtient, souvent,
Par une belle mort, plus qu’il n’eût fait vivant.
Peut-être ils m’ont choisi pour ce rôle sublime !


ISMÈNE.

Quel oracle a parlé, désignant la victime ?


HARMODIUS.

L’oracle intérieur qui m’ordonne d’agir.


ISMÈNE.

Tu peux lui résister sans avoir a rougir.
Ce n’est pas Dieu qui parle en toi, c’est ta colère,
Et la mort où tu cours n’aura point de salaire ;
Tu t’immoles toi-même et de ta propre main.


HARMODIUS.

Qu’importe que je meure, ou ce soir, ou demain !
Sait-on, sous des tyrans, ce qui vous reste à vivre ?
Mais que ma mort au moins soit un exemple à suivre !
Je puis donner mon sang, il n’appartient qu’à moi ;
Ainsi l’a fait Codrus, qui fut le dernier roi.
Moi, je serai, sauvant comme lui notre Attique,
Le premier citoyen mort pour la république.