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Page:Larguier - L'an mille, 1937.djvu/21

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ai soixante et vous aviez raison de dire qu’il est jeune. Nous sommes nés tous deux dans ce village des Gargantes que vous connaissez. Son père y était instituteur et c’est lui qui m’a appris à écrire et à lire. C’était hier ! voici la planchette tachée d’encre, les nœuds du chêne poli, mes initiales gravées avec un canif, et, à l’intérieur du pupitre, dans une boîte qui avait contenu du fil à coudre, un hanneton ou une bête à bon Dieu. La peluche verte de la boîte à compas sentait l’écrin et le bazar, les bijoux et le camphre. L’encre de Chine avait un parfum de vanille et de musc, et on entendait la meule du rémouleur qui aiguisait les couteaux-ciseaux, sous un marronnier de la place. Il y avait aux carreaux de l’école du soleil et des feuilles, des flocons de neige ou des gouttes écrasées de pluie, et je m’appliquais à copier le présent du verbe être : je suis, tu es, il est, nous