serais jamais venue, car votre devoir eût été d’obéir. Voilà tout.
— Est-il donc des parents qui ne pensent pas comme vous ?
— Mais oui, généralement ils se préoccupent fort peu des affections de leurs enfants. C’est ce qui fait la plus grande partie des malheureux dans votre classe.
— C’est affreux !
— Oui ; mais c’est l’usage, et l’on n’en dit rien ; on punit ceux qui enlèvent les mineurs, on ne dit rien à ceux qui, en abusant de leur confiance, brisent leur avenir.
— Qu’est-ce que d’enlever des mineurs ? demanda Lydie.
— Je ne vous expliquerai pas cela, mademoiselle, c’est une réflexion que je fais à part moi.
— Ainsi, j’aurais eu ma mère, vous ne seriez pas venue me prévenir, et j’aurais dû me résigner à obéir ? Agiriez-vous donc ainsi ?
— Je crois que oui ! Dans de certaines positions, on n’est pas libre, tout le monde vous regarde. Une petite fille ne peut pas, à elle seule, changer les usages d’une société ; et si ses actions étaient trop indépendantes, elle se compromettrait, et se jeterait dans des malheurs plus grands que ceux qu’elle voudrait éviter. Les pauvres, seuls, ont à peu près leur liberté. Moi, par exemple, j’ai déjà été demandée en mariage par bien des jeunes