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Page:Larroumet - Racine, 1922.djvu/182

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RACINE.

et d’Athalie. Au moment où Agrippine aurait besoin de dissimuler et de se concilier Burrhus, elle éclate et l’écrase de son mépris. Lorsque, après une longue attente, elle obtient enfin avec son fils une explication décisive, elle l’humilie dès les premiers mots.

Clytemnestre a observé longtehaps la dignité et l’obéissance que lui imposaient son titre de reine et de femme d’Agamemnon. Lorsqu’elle se voit arracher sa fille, l’instinct maternel l’emporte. Elle la défend comme une bête défend son petit ; elle pousse des cris déchirants. Malgré l’élégance et la mesure racinienne, la Sachette de Victor Hugo, dans Notre-Dame de Paris, n’est pas plus voisine de la nature primitive que la femme du roi des rois.

Athalie est aussi orgueilleuse qu’Agrippine et aussi violente que Clytemnestre. Arrivée au pouvoir par le crime, comme la première, elle poursuit l’extermination de l’enfant qui l’inquiète et veut briser la résistance du prêtre qui le soutient. Elle déteste Joas comme Clytemnestre aime Iphigénie ; elle traite Joad et Josabeth comme Agrippine traite Néron et Burrhus. Elle concentre la violence de sensibilité que Racine a répandue sur ses effrayantes héroïnes. Plus qu’elles encore, elle est la proie et la victime de la passion. Le poète, qui a montré dans sa dernière pièce la suprême puissance de son génie, a ramassé, dans ce caractère de femme, toute sa connaissance de la nature féminine. Mais, tandis que, dans les autres pièces, la volonté qui d’en haut mène les hommes se montre seulement par l’âme religieuse du poêèe, dans Athalie ce Dieu est par-