Aller au contenu

Page:Larroumet - Racine, 1922.djvu/21

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
17
ENFANCE ET JEUNESSE.

continua longtemps ce genre de travail. On y voit à quel point le besoin de la précision et de la justesse avait été éveillé en lui. Il s’attache à serrer de près le sens des textes, et, quoiqu’il use sobrement des formules admiratives, il indique les beautés avec une grande justesse. Il est peu d’auteurs anciens de quelque importance qui ne figurent dans sa bibliothèque, les uns achetés, quand il était pauvre, en éditions vulgaires, les autres en éditions savantes, voire luxueuses, lorsque sa fortune lui permit de satisfaire son goût pour les beaux livres.

Port-Royal se préoccupait d’écarter des yeux de ses élèves tout ce qui offrait un danger pour la morale. Cependant le choix des textes était singulièrement large ; il admettait des auteurs qui ont été longtemps éloignés des classes, ainsi les comédies de Térence. Racine était plus avancé en âge que ses compagnons d’études ; son intelligence était exceptionnelle, et ses maîtres croyaient pouvoir compter sur la solidité de ses principes moraux. Il est donc probable que le cercle des études habituelles s’élargissait pour lui. Au rapport de son ami Valincour, « les tragédies de Sophocle et d’Euripide l’enchantèrent à un tel point qu’il passoit les journées à les lire et à les apprendre par cœur, dans les bois qui sont autour de l’étang de Port-Royal ». Louis Racine a conservé le souvenir, devenu célèbre, d’une espièglerie dont peu d’écoliers seraient capables : « Il trouva par hasard le roman grec des amours de Théagène et de Chariclée. Il le dévoroit, lorsque le sacristain Claude Lancelot, qui le surprit dans cette lecture, lui arracha le livre et le jeta au feu. Il