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Page:Las Cases - Mémorial de Sainte-Hélène, 1842, Tome II.djvu/223

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passa ce fleuve le 2 novembre. Des pourparlers eurent lieu : le baron de Saint-Aignan fut à Francfort ; il eut des conférences avec les comtes de Metternich, de Nesselrode et lord Aberdeen, et arriva à Paris porteur de paroles de paix sur les bases suivantes : – Que l’Empereur renoncerait au protectorat de la confédération du Rhin, à la Pologne et aux départements de l’Elbe, mais que la France resterait entière dans ses limites des Alpes et dit Rhin, la Hollande y compris, et qu’on discuterait une frontière en Italie, qui devrait séparer la France des États de la maison d’Autriche. L’Empereur adhéra à ces bases ; mais le congrès de Francfort était une ruse mise en avant comme le congrès de Prague, dans l’espoir que la France refuserait. On voulait avoir un nouveau texte de manifeste pour travailler l’esprit public ; car, au moment où ces propositions conciliatrices étaient faites, l’armée alliée violait la neutralité des cantons et entrait en Suisse. Cependant les alliés firent connaître enfin leur véritable intention ; ils désignèrent Chatillon-sur-Seine, en Bourgogne, pour la tenue du congrès. Les batailles de Champaubert, de Montmirail et de Montereau détruisirent les armées de Blucher et de Witgenstein ; on ne négocia pas à Chatillon ; les puissances coalisées y présentèrent un ultimatum dont les conditions étaient : 1° l’abandon de toute l’Italie, de la Belgique, de la Hollande et des départements du Rhin ; 2° l’obligation, pour la France, de rentrer dans les limites qu’elle avait avant 1792. L’Empereur rejeta cet ultimatum ; il consentait à faire aux circonstances le sacrifice de la Hollande et de l’Italie, mais se refusa à abandonner les limites des Alpes et du Rhin, la Belgique, spécialement Anvers. Les trahisons firent triompher les coalisés, malgré les victoires d’Arcis et de Saint-Dizier. Jusqu’alors ils n’avaient manifesté aucune prétention de s’immiscer dans les affaires intérieures de la France, ce que constate l’ultimatum de Chatillon, signé par l’Angleterre, l’Autriche, la Russie et la Prusse, lorsque plusieurs émigrés rentrés se réveillèrent à la vue des armées autrichiennes, russes et prussiennes, dans les rangs desquelles ils avaient longtemps porté les armes : ils crurent le moment arrivé de voir leurs rêves se réaliser ; les uns arborèrent la cocarde blanche, les autres la croix de Saint-Louis. Ils furent désapprouvés par les souverains alliés ; Wellington même désavoua à Bordeaux, quoiqu’il les favorisât secrètement, tous ceux qui voulaient relever les enseignes de la maison de Bourbon. Dans toutes les transactions qui détachèrent la Prusse de l’alliance de la France et la réunirent à la Russie, au traité de Kalich ; dans celui qui réunit l’Autriche à cette coalition ; dans tous les actes diplomatiques publics et secrets qui se sont