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Page:Las Cases - Mémorial de Sainte-Hélène, 1842, Tome II.djvu/325

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doivent sans doute aller au cœur de tous ceux qui m’écoutent. »

Ici le gouverneur a paru remué, les officiers l’étaient. Il a gardé quelques moments de silence, m’a salué, et nous nous sommes séparés.

MM. de Montholon et Gourgaud ont eu leur tour, et nous nous sommes retrouvés tous les quatre auprès de l’Empereur, à sa toilette, sans que nous pussions l’informer positivement s’il avait été rien décidé à notre égard. L’Empereur a ensuite voulu prendre l’air, en dépit d’un vent très fort, et nous avons marché tous jusqu’au fond du bois. Il passait en revue toutes les combinaisons du gouverneur avec cette rapidité, cette fécondité qui lui est propre, et concluait toujours par dire que si nous concédions aujourd’hui une signature pour échapper au départ, demain il se trouverait une autre cause d’expulsion, et qu’il aimait mieux que cela fût plutôt avec éclat que sans bruit. Puis, donnant tout-à-coup à la chose une tournure de plaisanterie, il disait que le gouverneur, après tout, ne voudrait peut-être pas réduire le nombre de ses sujets à un seul, et quel sujet encore, ajoutait-il, un vrai porc-épic, sur lequel il ne saurait comment poser la main.

Durant notre promenade, deux étrangers se sont montrés assez près de nous. L’Empereur leur a fait demander qui ils étaient. Ils appartenaient au bâtiment qui devait appareiller le lendemain pour l’Europe.