Aller au contenu

Page:Las Cases - Mémorial de Sainte-Hélène, 1842, Tome II.djvu/394

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

donna l’ordre de faire habiller à neuf tous ceux qui lui avaient rendu ce service, y ajouta un présent pécuniaire, et les rendit à la liberté.

Un jeune matelot anglais, travaillé de la maladie du pays, s’échappa d’un dépôt, et parvint à gagner les bords de la mer, dans les environs de Boulogne, où il vivait caché dans les bois. Dans sa passion de revoir son pays à tout prix, il essaya de construire un petit canot qui pût lui servir à gagner les croiseurs anglais, qu’il était occupé une grande partie du jour à guetter de la cime de quelques arbres. Il fut saisi au moment où, chargé de son esquif, il allait le jeter à l’eau et s’y aventurer. On l’emprisonna comme espion ou voleur. La chose étant parvenue jusqu’à Napoléon, qui se trouvait à Boulogne, il eut la curiosité de voir cette embarcation dont on parlait beaucoup ; il ne put croire, à sa vue, qu’il fût un être assez insensé pour avoir osé en faire usage ; et il se fit amener le matelot, qui lui confirma que telle avait été sa résolution, lui demandant pour toute faveur la grâce de lui permettre de l’exécuter. – Mais tu as donc une bien grande envie de revoir ton pays ? lui dit l’Empereur ; y aurais-tu laissé quelque maîtresse ? – Non, répondit le matelot, ce n’est que ma mère qui est vieille et infirme, et que je voudrais revoir. – Eh bien ! tu la reverras, s’écria