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Page:Las Cases - Mémorial de Sainte-Hélène, 1842, Tome II.djvu/726

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condriaque droite une tuméfaction qui est sensible à la pression extérieure. Langue presque constamment blanche. Le pouls, qui avant la maladie donnait 54 à 60 pulsations par minute, va jusqu’à 88. Douleur au-dessus de l'acromion. Administré pour exciter le foie et le ventre, rétablir la sécrétion de la bile, deux purgatifs. Soulagement, mais peu durable. Dans les derniers jours de mai et les premiers jours de juin, les effets en étaient faibles et momentanés. Proposé le mercure, mais le malade a montré la répugnance la plus vive ; il a repoussé l’usage de ce médicament sous quelque forme qu’il fût déguisé. Conseillé de monter à cheval, de faire chaque jour avec une brosse des frictions sur la région hypocondriaque, de porter de la flanelle, de prendre des bains chauds, des remèdes, quelques divertissements, de suivre un régime, de ne pas s’exposer aux mauvais temps, aux variations de l’atmosphère. Il a négligé les deux choses les plus importantes, l’exercice et la distraction. Enfin le 11 juin, nous avons triomphé de sa répugnance. J’ai obtenu qu’il ferait usage du mercure. Il a en effet pris des pilules mercurielles, n° ij, gra. vj. Il a continué ce traitement jusqu’au 16. Je lui en donnai soir et matin, et de temps à autre quelques purgatifs pour dissiper la constipation. Au bout de six jours je changeai la prescription, et substituai au mercure le calomelas (submurias hydrargyri), mais il produisit des maux de cœur, des vomissements, des coliques, une inquiétude générale ; je cessai de l'employer. Je l’administrai de nouveau le 19 ; il causa les mêmes désordres. Je revins à la première préparation mercurielle, que j’employai trois fois par jour. J’interrompis le traitement le 27. Les appartements sont extrêmement humides. Napoléon avait contracté un violent catarrhe. Il avait une grosse fièvre, une irritation des plus vives. Ce médicament fut repris le 2 juillet, je le continuai jusqu’au 9, mais n’en obtins aucun heureux effet. Les glandes salivaires étaient toujours dans le même état. L’insomnie, l’irritation croissaient ; les vertiges devenaient fréquents. Deux ans d’inaction, un climat meurtrier, des appartements mal aérés, bas ; un traitement inouï, l’isolement, l’abandon, tout ce qui froisse l’âme agissait de concert. Est-il surprenant que le désordre se soit mis dans les fonctions hépatiques ? Si quelque chose étonne, c'est que les progrès du mal n’aient pas été plus rapides. cet effet n’est dû qu’a la force d’âme du malade et à la bonté d’une constitution qui n’avait point été affaiblie par la débauche.

« Signé Barry E. O'Méara,
Chirurgien, etc. »
Longwood, 9 juillet 1818.