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Page:Latocnaye - Promenade d un francais en suede et en norvege, 2e part, 1801.djvu/184

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trois pêcheurs et des gens de la maison qui criaient avec eux, sans savoir pourquoi ; je m’arrangeai comme l’ai dit, et je criai d’une voix terrible, « qui de vous osera n’approcher à présent ? » Ma contenance héroïque, fit voir à mes gens que je n’étais pas un poisson ordinaire, et bientôt ils se retirèrent, après m’avoir fait des excuses et des complimens. Je les avais payés un tiers de plus que je ne le devais, et si j’eusse donné davantage, rien n’aurait pu les satisfaire. Dans ce cas, un étranger isolé n’a guêres d’autres ressources que de payer de bonne mine, et c’est ce que je suis habitué à faire ; quand il le faut, je sais me présenter à la bataille, avec autant de fierté que le bon Ulysse chez les Mirmidons.

Il me fallut pourtant passer la nuit, chez ces gens ; le manque de chemin demandait au moins quatre heures pour me rendre à l’autre fiord quoiqu’il n’y eût guères qu’un mille. La route est à travers des escaliers raboteux, sur lesquels, le cheval ne fait un pas, qu’après avoir assuré les jambes en mouvement. Les rochers qui bordent cette gorge étroite et sauvage sont si remplis de cascades, que la pierre elle-même semble fondre en eau. Le soleil a peine, à éclairer ces abymes profonds, et le peu de végétation que l'on aperçoit