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Page:Lauris - L’Écrin du rubis, 1932.djvu/132

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L’ÉCRIN DU RUBIS

qui en était l’atmosphère, le simulacre, l’évocation. Je l’ai eue éperdue sous moi, abreuvant ses lèvres de l’écume de ma traîne où se noyait son visage, lui foulant son sein nu de ma petite bottine de chevreau glacé, ou faisant tourbillonner sur elle les ondes épaisses de mes échelles de volants. Elle s’est pâmée des heures entières sous l’encensoir de mes jupes dont elle épiait les judas qui s’ouvraient sur ma peau, alors que couchée sur le tapis elle vivait ce souhait de Henri Heine :

Le front dit : Si j’étais le coussin préféré
Où repose son pied, la chère bien-aimée,
Radieux, je tiendrais ma plainte renfermée
Sous les trépignements de ce pied adoré.

Il n’était pas de complaisance qui lui fût de moi plus sensible que de lui laisser porter tout un jour la chemise et le pantalon qu’au lendemain d’une de mes rencontres amoureuses, elle retrouvait tout fripés au pied de mon lit. Sa chair s’y délectait sur la trace des étreintes fourbues que lui représentait son imagination, car, je lui avais confié que la jouissance de ma nudité dont j’étais très fière, était une faveur à moi seule réservée, et que jamais personne n’avait cueilli la pâmoison de mes sens que dans l’appareil des intimités qui m’en faisaient savourer le mystère.