Aller au contenu

Page:Lazare - Dictionnaire administratif et historique des rues de Paris et de ses monuments, 1844.djvu/485

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

établissements n’ont pu seconder pleinement notre intention et élever la musique au point que nous nous l’étions promis, nous avons cru, pour y mieux réussir, qu’il était à propos d’en donner la conduite à une personne dont l’expérience et la capacité nous fussent connues, et qui eût assez de suffisance pour former des élèves, tant pour bien chanter et actionner sur le théâtre qu’à dresser des bandes de violons, flûtes et autres instruments. À ces causes, bien informé de l’intelligence et grande connaissance que s’est acquis notre très cher et bien-amé Jean-Baptiste Lully, au fait de la musique dont il nous a donné et donne journellement de très agréables preuves depuis plusieurs années qu’il s’est attaché à notre service, qui nous ont convié de l’honorer de la charge de surintendant et compositeur de la musique de notre chambre, nous avons audit sieur Lully permis et accordé, permettons et accordons par ces présentes d’établir une Académie royale de musique dans notre bonne ville de Paris qui sera composée de tel nombre et qualité de personnes qu’il avisera bon être, que nous choisirons et arrêterons sur le rapport qui nous en sera fait, pour faire des représentations par-devant nous, quand il nous plaira, des pièces de musique qui seront composées tant en vers français qu’autres langues étrangères, pareille et semblable aux académies d’Italie, pour en jouir sa vie durant et après lui celui de ses enfants qui sera pourvu et reçu en survivance de ladite charge de surintendant de la musique de notre chambre, avec pouvoir d’associer avec lui qui bon lui semblera, pour l’établissement de ladite académie, et pour le dédommager des grands frais qu’il conviendra faire pour lesdites représentations, tant à cause des théâtres, machines, décorations, habits, qu’autres choses nécessaires, lui permettons de donner en public toutes les pièces qu’il aura composées, même celles qui auront été représentées devant nous, sans néanmoins qu’il puisse se servir pour l’exécution desdites pièces des musiciens qui sont à nos gages, comme aussi de prendre telles sommes qu’il jugera à propos, et d’établir des gardes et autres gens nécessaires aux portes des lieux où se feront lesdites représentations, faisant très expresses inhibitions et défenses à toutes personnes de quelque qualité et condition qu’elles soient, même les officiers de notre maison, d’y entrer sans payer ; comme aussi de faire chanter aucune pièce entière en musique, soit en vers français ou autres langues étrangères, sans la permission par écrit dudit sieur Lully, à peine de 10 000 liv. d’amende et de confiscation des théâtres, machines, décorations, habits et autres choses, applicable un tiers à nous, un tiers à l’hôpital général et l’autre tiers audit sieur Lully, lequel pourra aussi établir des écoles particulières de musique en notre bonne ville de Paris, et partout où il jugera nécessaire pour le bien et l’avantage de ladite académie royale, et d’autant que nous l’érigeons sur le pied de celles des académies d’Italie, où les gentil hommes chantent publiquement en musique sans déroger, nous voulons et nous plait que tous gentil hommes et demoiselles puissent chanter auxdites pièces et représentations de notre dite académie royale de musique, sans que pour ce ils soyent censés déroger audit titre de noblesse, ni à leurs privilèges, charges, droits et indemnités. Révoquons cassons et annulons par ces présentes, toutes permissions et privilèges que nous pourrions avoir ci-devant donnés et accordés, même celui dudit sieur Perrin pour raison desdites pièces de théâtre, en musique, sous quelques noms, qualités conditions et prétexte que ce puisse être, etc. Donné à Versailles au mois de mars l’an de grâce 1672, et de notre règne le 29e, signé Louis. » — En possession de ce privilège Lulli transféra son théâtre au jeu de paume du Bel-Air, rue de Vaugirard, près du palais du Luxembourg. L’ouverture eut lieu le 15 novembre 1672 par la première représentation des Fêtes de l’Amour et de Bacchus. La salle du Palais-Royal étant restée inoccupée par suite de la mort de Molière, Lulli vint y établir son théâtre. De nombreux succès récompensèrent le zèle et les talents de Lulli qui mourut en 1687.

Avant de rappeler les autres changements survenus dans cet établissement, nous allons donner une idée de la position financière des artistes de l’Opéra au commencement du XVIIIe siècle. Ce document règlementaire porte la date du 11 janvier 1713 ; il est intitulé :

ÉTAT

du nombre de personnes, tant hommes que femmes, dont le roi veut et entend que l’Académie royale de Musique soit toujours composée, sans qu’il puisse être augmenté ni diminué.

ACTEURS POUR LES ROLLES.
basse-tailles.
Premier acteur. 1 500 liv.
Second acteur. 1 200 liv.
Troisième acteur. 1 000 liv.
hautes-contres.
Premier acteur. 1 500 liv.
Second acteur. 1 200 liv.
Troisième acteur. 1 000 liv.
ACTRICES POUR LES ROLLES.
Première actrice. 1 500 liv.
Deuxième actrice. 1 200 liv.

(Suit une proportion décroissante jusqu’à la sixième actrice dont les appointements sont fixés à 700 liv.)

pour les chœurs.

Vingt-deux hommes à 400 livres et deux pages à 200 livres.

Douze femmes à 400 livres.