Page:Lazare - L’Antisémitisme, 1894.djvu/195

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figuré : « L’eau du baptême emporte l’odeur juive, dit-il, le troupeau purifié exhalera une odeur nouvelle[1]. » Du reste, on associait l’idée de bonne odeur à celle de pureté ; dire d’un bienheureux qu’il était mort en odeur de sainteté, voulait réellement dire que ce saint personnage avait eu le don d’émettre des baumes divins. Si nous lisons la vie de saint Dominique, celle de saint Antoine de Padoue, celle de François de Paule, nous voyons qu’ils jouirent de ce privilège. Par contre, les vicieux, les impies, tous ceux dont l’âme était impure, devaient répandre une odeur empestée. Saint Philippe de Néri, affirme son biographe, distinguait à l’odeur les vices incontinents des hommes, et il devinait ainsi la présence du démon ; Dominique de Paradis et Gentille de Ravennes avaient aussi cette faculté. Quant au diable, chacun, au Moyen Âge, s’accordait à dire qu’il révélait sa venue par une exhalaison bouquine et empoisonnée. Le Juif, qui était le pire des impies, et le vrai fils de Satan, ne pouvait par conséquent qu’exhaler des émanations atroces. Chose étrange, les Juifs avaient des idées analogues sur les relations du péché et de la mauvaise odeur et, d’après Maïmonides, le serpent avait jeté sa puanteur sur la race d’Ève, mais les Juifs fidèles avaient été préservés.

Ainsi peut-on expliquer encore quelques-uns des préjugés antijuifs ; mais s’il est évident que l’assi-

  1. Fortunat : Poème, l. V.