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Page:Lazare - L’Antisémitisme, 1894.djvu/266

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tinée des différents peuples n’a pas été semblable, mais cela ne veut pas dire que l’inégalité de ces peuples fut originelle. Cela veut dire simplement que certains peuples se trouvèrent dans des conditions géographiques, climatériques et historiques, plus favorables que celles dont jouirent d’autres peuples, qu’ils purent par conséquent se développer plus complètement, plus harmoniquement, et non qu’ils eurent des dispositions meilleures, ni une cervelle plus heureusement conformée. La preuve en est que certaines nations appartenant à la race blanche, dite supérieure, ont fondé des civilisations de beaucoup inférieures aux civilisations des jaunes ou même des noirs. Il n’y a donc pas de peuples ni de races originairement supérieurs, il y a des nations qui « dans certaines conditions ont fondé des empires plus puissants et des civilisations durables »[1].

Quoi qu’il en soit, et dans le cas qui nous occupe, ces principes ethnologiques, vrais ou faux, ont été, par le seul fait de leur existence, une des causes de l’antisémitisme ; ils ont permis de donner à une manifestation que nous reconnaîtrons plus tard nationaliste et économique, une apparence scientifique, et grâce à eux, les griefs des antisémites se sont fortifiés de raisons pseudo-historiques et pseudo-anthropologiques. En effet, non seulement on a admis l’existence des trois races nègre, jaune et blanche rangées par ordre hiérarchique, mais dans ces races

  1. Léon Metchnikoff : La Civilisation et les Grands Fleuves (Paris, 1889).