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Page:Le Bon - Psychologie de l’Éducation.djvu/190

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L’enseignement dit moderne répondait à d’incontestables besoins, et cependant il végéta misérablement. Nous allons en avoir la preuve en lisant quelques extraits des rapports présentés à la Commission. Montrons d’abord le but de cette éducation, tel que l’a résumé un ancien ministre de l’Instruction publique, M. Berthelot.

L’éducation moderne, si elle était convenablement dirigée, devrait reposer essentiellement sur l’étude du français, des langues modernes et des sciences, et préparer d’une façon fructueuse aux carrières par lesquelles les citoyens peuvent vivre et servir leur patrie d’une manière indépendante[1].

Certes, ce programme était excellent ; voyons comment l’Université en a tiré parti :

Au lieu de se borner à détruire les défauts de l’enseignement classique, on lui a juxtaposé un nouvel enseignement fait à son image ; une sorte de contrefaçon, de reproduction de second ordre ; on a créé une sorte d’Odéon à côté du Théâtre-Français.

Le nouveau venu n’a rien innové, rien guéri. Il nous apparaît avec les mêmes défauts de son ancien : — même surcharge des programmes : — on a supprimé les langues mortes, mais on a ajouté les langues vivantes, la législation usuelle, l’économie politique, etc., etc. — Même système de classes rigides, imposant des efforts égaux à des esprits inégaux ; même déchet dans les résultats ; même production de non-valeurs[2].

L’enseignement secondaire moderne est de création toute récente, puisqu’il ne date que de sept ou huit années ; il est encore difficile d’en apprécier les résultats. Mais, dès maintenant, il est permis de craindre qu’au point de vue qui nous occupe ces résultats ne soient pas sensiblement meilleurs que ceux de son frère aîné. L’enseignement moderne n’est guère autre chose que l’enseignement classique débarrassé du grec et du latin et quelque peu fortifié du côté des sciences et des langues vivantes ; cet enseignement reste toujours et avant tout théorique, tout ce qui, dans ses programmes, pourrait présenter un caractère pratique étant relégué au second plan[3].

  1. Enquête, t. I, p. 22. Berthelot.
  2. Enquête, t. I, p. 449. Maneuvrier, ancien élève de l’École Normale Supérieure.
  3. Enquête, t. II, p. 512. Jacquemart, inspecteur de l’enseignement.