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Page:Le Littré de la Grand'Côte, éd. 1903.pdf/62

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On expliquait l’expression par ce fait que jadis il y aurait eu à Mâcon un maitre d’hôtel du nom de Delorme, qui était de la confrérie dont on prétend que saint Joseph est le patron. Sa femme s’enfuit avec un officier par le coche d’eau. Le mari arriva sur le quai juste pour le voir partir. Sur quoi un témoin de s’écrier : Il est bon là, M. Delorme ! — Je vous donne l’histoire telle que Bosson me l’a racontée, il y a quelque six ans. — Cette expression, doût les Lyonnais s’assassinaient dans ma jeunesse, me parait tomber en désuétude.

BON-AMI. — Le masculin de bonne-amie.

BONBONS. — Avoir des bonbons sous le nez. Euphémisme pour indiquer les rognes que l’on a souvent sous le nez après un gros rhume de cerveau.

BON DIEU. — Il semble que le bon Dieu vous descend dans le gosier en culottes de velours. Locution d’origine ecclésiastique. Ne se dit pas quand on boit du Brindas, mais bien un vin chaud, généreux, velouté, pénétrant.

BONDON, s. m. — Euphémisme pour un terme bas. M. Chrétien disait toujours : Vous lui ferez prendre le remède par le bondon.

BONIFACE, s. m. — Un qui est malicieux comme un oison. Un grand Boniface. Comment que te trove ton prétindu, disait-on à la Touainon, de Pollionay. — A paré ben dzenti, mé al è in grand Boniface. — A n’é rin méchant ! A te fera bin tot ce que te vodré. — De l’analogie entre bonne face et Boniface, nom propre.

BONJOUR. — Bonjour, braves gens, excusez si je me trompe. Formule de politesse délicate que l’usage astreint à dire à chaque fois que, par erreur, l’on pénètre dans quelque assemblée où l’on n’était pas convié. Par exemple, chez Casati, vous vous trompez de porte et vous tombez dans un banquet de procureurs : Bonjour, braves gens, excusez si je me trompe.

Bonjour, voisin ; voilà la tête ; le… fond viendra demain. Phrase bienveillante que nous avons accoutumé de dire aux cavaliers inexpérimentés qui se penchent en avant au trot du cheval. On comprendra facilement que pour que la tête arrive aujourd’hui et le reste demain, il faille être fortement penché en avant. Cela semble même une sorte d’exagération.

BONNE-AMIE. — Tout honnête Lyonnais emploie cet euphémisme pour maitresse. En 1814, nous logions un grand escogriffe de soldat autrichien qui avait immédiatement retenu le mot. Il restait couché toute la journée et ne se levait que pour manger. Il s’étirait longuement en disant : Touchours poire ! Touchours mancher ! Touchours tormir ! Touchours foir ponne amie ! Ce garçon avait sur les quatre fins de l’homme les vues d’une philosophie douce.

BONNES. — Être dans ses bonnes. Se dit des dames qui, le matin, ont mis leur bonnet du bon côté ; mais cela arrive rarement.

BONNES GENS. — Exclamation qui exprime surtout la compassion, comme le pécaire des Provençaux, le petsaire, petsirète des gens du Gévaudan, le beaussaigne (beau Seigneur) des Gagas, le bissaigne des Ponauds, le povero, poverino des Italiens. Je connaissais une veuve qui se remariait. Rien ne manquerait à mon bonheur, disait- elle, si mon pauvre défunt était là, bonnes gens !

BONNET. — Bonnet de crême. Tiens, tiens, vela Pouillason que s’amène avè son bonnet de crême ! — Mais pourquoi de crême ? — Parce que le laid est dessous.

BONNE TÊTE. — Avoir bonne tête ou une bonne tête, ne signifie pas pour nous avoir un visage agréable, mais beaucoup de capacité. André Ampère avait bonne tête. — C’est le sens classique de l’expression (voy. La Bruyère). Avoir bonne tête pour bon visage est de l’argot moderne.

BONNETTE, s. f. — Coiffe de nuit. Le bonnet est pour l’homme, la bonnette pour la femme. Quoi de plus naturel ?

BOQUE, s. f. — Pontiaude, femme lourde, épaisse. Ne s’emploie qu’avec l’adj. grosse, comme mique, qui en est l’opposé, avec grande. Vouliont-t’i pas me faire marier c’te grosse boque ? — Sorte d’onomatopée. Oque exprime le lourd, le grossier : bloc, mastoque, gnoque.