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Page:Le Parnasse contemporain, II.djvu/148

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Un mont, dans la lumière ; un mont, tel qu’un pilastre ;
Un mont qui, sous la voûte en feu du firmament,
Flamboyait, chauve & nu, dans le rayonnement
Immense des cieux.
Immense des cieux. Or, étendu sous un orme
Dont le soleil trouait la frondaison énorme,
Je regardais la roche âpre, chauffée à blanc,
Corrodée à la cime & corrodée au flanc,
Et, sous elle, l’abîme intense de la plaine
Avalant tout le feu dont la nue était pleine ;
Et je voyais flamber dans le miroir de l’eau
Les cheveux du soleil & les bras du bouleau ;
Mais, si loin que mes yeux lassés pouvaient s’étendre,
Rien de vert, rien de doux, rien d’ombreux, rien de tendre
Ne se montrait parmi l’irradiation
De la nature, tout entière en fusion.
Nul souffle. Aucun bruit. Rien ne remuait. Les terres,
Au nord comme au midi, rutilaient, solitaires
Sous ce ciel implacable & rempli d’un éclair,
Qui n’avait pas de trêve & qui dévorait l’air.
De ses langues de feu l’élémentaire flamme
Ardait tout, m’arrivant, subtile, jusqu’à l’âme,
Et je croyais qu’en proie à cet ardent baiser,
J’allais m’évanouir & me vaporiser ;
Et qu’altérés, chauffés au point de se dissoudre,
Incendiés, noircis, calcinés, mis en poudre,
Ravins & mamelons, encore tout fumants,
Se désagrégeraient sous ces cieux incléments ;
Et déjà je pleurais, hélas ! sur nos vallées…