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Page:Le Parnasse contemporain, II.djvu/182

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À moi, les jeunes gens ! qui me fait vis-à-vis ?
Je vous reviens de loin : retour de canotage !
Mais consolez-moi donc des gens que j’ai suivis,
Et je ne repars plus ; c’est mon dernier voyage ! »

Sa toque retombait sur ses yeux ennuyés ;
Son col blanc chiffonnait les plis de sa dentelle ;
Sa main gauche étendait sur l’eau ses doigts mouillés.
Et l’autre nous frappait du bout de son ombrelle.

Nous la laissions parler, étant peu soucieux
D’arrêter le caprice expansif d’une femme ;
Nous nous sentions saisis, dans nos rêves joyeux,
D’un amour pour l’eau pure où plongeait notre rame.

L’eau semble jeune encore ; elle est restée enfant.
Depuis qu’elle a jailli de sa source divine
Couchée en son lit clair, sa fraîcheur la défend ;
Elle ne vieillit pas, dans sa course enfantine.

Et cette pureté dure sans se ternir :
Le sol vert se flétrit sous le froid qui le blesse.
L’arbre d’avril jaunit quand l’hiver va venir ;
L’eau conserve toujours sa limpide jeunesse.