Page:Le Stylet en langue de carpe.djvu/124

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Je rêve longtemps devant ce témoignage de haine homicide. Il fut un temps ou tout le monde sortait avec cela dissimulé en un pli du vêtement, à la jarretière pour les femmes.

Et maintenant, en plein vingtième siècle, ne me voyais-je pas menacé comme on le fut aux temps heureux de la dague intime ? Combien faut-il de temps, en effet, même dans la rue, pour enfoncer cela dans une poitrine humaine et disparaître ?

La ciselure de la poignée apportait à mes réflexions son cocasse commentaire : Prépare-toi à venir me trouver… semblait dire le diable.

Je haussai les épaules et revins voir Rubbia. Mon étonnement fut grand quand je la vis dormir. Avait-elle entendu quelque chose ? Comment se faisait-il qu’elle n’eût aucune curiosité, aucune inquiétude, aucun souci en me voyant sauter comme un fou vers la porte et ne point revenir ? Et pourtant un instinct me disait qu’elle eût autant que moi à redouter.