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Page:Le Stylet en langue de carpe.djvu/66

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si menteur qu’on croirait y lire une émotion de fillette pure. Et devant le corps viril que je viens de dévêtir, la duplicité d’une telle apparence donne à l’inconnue un charme de plus. Elle réfléchit trois secondes. Un magnifique sang-froid revient dans cette âme brutale qui tout à l’heure se réjouissait de me faire souffrir.

Elle questionne enfin, d’une voix si frêle que je crois ouïr la plus parfaite musique dont on puisse rêver :

— Mortelle, la blessure ?

J’hésite. C’est si inattendu, cette question sèche et glaciale, que peu s’en faut de m’entendre répondre violemment oui. Car je ne puis me retenir de désirer voir cette mystérieuse femme enfin domptée. Ah, la faire pleurer !…

Mais je me domine et articule avec lenteur :

— Non. Rien qu’une petite entaille. Ne bougez pas et ne parlez pas.

Nous nous regardons un instant en silence et je demande enfin bêtement :