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Page:Le dragon blesse Croisset Francis 1936.djvu/32

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sont des groupes de jeunes Chinois, tous en veston, tous portant des lunettes, tous nu-tête et qu’accompagnent de jeunes Chinoises vêtues d’une robe fourreau. Je me retourne irrité : les rires s’accentuent.

— Rien à faire, il n’y a qu’à encaisser, murmure Durec.

D’où je suis, j’aperçois la campagne. Elle m’apparaît comme un désert pierreux. Mais ces pierres incessantes, pressées les unes contre les autres, craquelées et que les racines attaquent sont des tombes. Elles émergent à fleur du sol, pêle-mêle, parmi les cercueils récents jetés là et qui pourrissent. Toute la campagne de Canton est un cimetière. Longtemps j’avais cru que les Chinois avaient le respect des morts : ils n’en ont que la crainte et à la condition qu’il s’agisse de leurs ascendants. Les morts anonymes ne sont plus que de la charogne dont on se débarrasse n’importe où.

— C’est un affreux endroit, déclarai-je.

— Vous ne direz pas cela ce soir, affirme Durée. Après dîner, nous vous mènerons voir les sampangs. C’est autre chose, je vous jure. D’ailleurs, la ville aussi a des coins curieux, je vais vous les montrer.

Nous repartons et, au bord d’un affluent