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Page:Leblanc — Contes du soleil et de la pluie, parus dans L’Auto, 1902-1907.djvu/173

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gré le vent, la tempête, les vagues furieuses, les galets gémissants, ce fut comme un grand silence où expiraient, tous les bruits, silence de mort, silence d’éternité.

Là-bas il n’y avait plus rien. Durant des secondes il n’y eut plus rien, durant des minutes… C’était fini.

Cependant l’être sur son radeau gesticulait…

Le jour passa. Toute la nuit des femmes restèrent, grelottantes, à genoux. Il n’était plus possible d’espérer. Mais c’étaient des mères, des amantes…

La nuit passa. Le vent balayait les espoirs comme des nuées attardées. Madeleine pleurait, Mme Argueil pleurait. Où trouvaient-elles tant de larmes ?

Quand l’aube sinistre parut, on vit quelque chose qui dansait sur la mer plus sage, le radeau, oui, le radeau, avec le naufragé qui gesticulait.

Et il approcha, il approcha. Une vague plus forte le jeta sur la plage. L’être sauta. C’était un singe…

Un grand singe qui se mit à gambader joyeusement…

Une des femmes lui cassa la tête d’un coup de galet.

Maurice LEBLANC.