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Page:Leblanc — Contes du soleil et de la pluie, parus dans L’Auto, 1902-1907.djvu/403

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Ils le visitèrent, mais rien ne leur plut comme l’esplanade magnifique qui s’étend entre ses murs. Tout autour c’est la très haute enceinte, fortifiée de tours massives. Au milieu, sur une butte, s’érige le donjon. Et à l’abri des puissantes murailles, le jardin est infiniment paisible. De belles fleurs y sourient. Il y flotte des odeurs violentes.

Le passé féodal revit ici. D’Estrignat l’évoqua. Ils assistèrent aux longs sièges sanglants, aux assauts, aux pillages, aux tueries, aux incendies. Les plus grands noms de France sont mêlés à l’histoire de ces combats et de ces meurtres, les Mayenne, les Longueville, les Berry, les Penthièvre, les La Rochefoucauld.

Tout cela se conserve dans l’enceinte de pierre comme des souvenirs que l’on retrouve au fond d’un coffret précieux, fleurs séchées, rubans fanés… Ce sont des reliques que le temps n’atteint pas. Ceux qui ont le don de frémir au contact des choses défuntes les contemplent avec piété.

D’Estrignat et Suzanne se sentirent très seuls parmi les ruines imposantes, et la solitude leur fut très douce.

Gournay aussi peut s’enorgueillir de sa noblesse et de son ardeur à travers les siècles. Elle aussi s’illustra dans les guerres contre l’Anglais et connut les discordes religieuses. Mais les vestiges des grandes époques ont disparu. Plus de château. Les remparts sont transformés en promenades pacifiques. De l’eau vive coule dans les fossés.

Et c’est là le charme incomparable de