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Page:Leblanc - Des couples, 1890.djvu/219

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un amour

tissaient fatalement à deux ou trois incidents sans importance, qui résumaient pour elle le travail incessant de la lassitude, ce lent désagrégeaient de l’amour, que son esprit ne distinguait pas.

… Jadis, dans le rez-de-chaussée que Civialle avait loué, Marthe faisait à son amant la surprise de nouveaux dessous. C’était sa joie, quand il la dévêtait, d’apercevoir quelque forme de chemise ou de jupon, imaginée par elle et pour lui, un embellissement, un raffinement de cette élégance intime qui le séduisait et le flattait. Or, un matin, elle arriva tout heureuse, se débarrassa de son manteau de fourrure, d’une robe flottante qu’elle mettait souvent à ses rendez-vous, et apparut en une longue chemise empire, en soie bleu-ciel, ouverte sur le devant et attachée entre les seins par l’agrafe d’un galon d’argent, qui descendait en suivant le contour inférieur de la poitrine et remontait en pointe au milieu du dos. Ses bras étaient nus et de larges échancrures découvraient les aisselles. Il ne remarqua rien, l’embrassa et lui parla, l’air préoccupé. Ce fut une déception immense, et bien qu’elle en rît ensuite et se moquât d’elle-même, elle garda de cette indifférence une blessure cuisante.