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Page:Leblanc - Des couples, 1890.djvu/58

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la fortune de m. fouque

leçon apprise, sans se tromper d’un mot. À chaque phrase il observait sur le visage de son auditeur l’impression produite et concluait :

— Voilà, mon bon, qu’en dites-vous ? Qu’auriez-vous fait à ma place ?

Et si on le blâmait de sa mansuétude, il ricanait :

— Attendez, attendez… je combine une vengeance !

Cette vengeance, dont il ne s’inquiétait du reste point, il eut deux occasions de l’exercer, ce qui acheva de le calmer.

Un soir, au cercle, il jouait avec Boulard une partie de dominos où revenaient inévitablement les plaisanteries usitées, les jeux de mots obligatoires, lorsque soudain Ferrand se présenta.

Alors bruyamment M. Fouque jeta sur le marbre les dés qui lui restaient et se leva en murmurant :

— C’est trop d’aplomb.

Puis il saisit son chapeau, s’en coiffa et, le regard insolent, passa devant son rival.

Le lendemain il colportait :

— Figurez-vous que j’ai fait à Ferrand un affront sanglant ! S’il l’empoche, c’est un fameux lâche.