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Page:Leblanc - L'Enthousiasme, 1901.djvu/104

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L’ENTHOUSIASME

ginai son isolement à la campagne, les souvenirs cruels, l’attente. Elle m’aimait bien, je le sentis.

La douceur infinie avec laquelle nous songions l’un à l’autre guérit nos blessures. Je voulus m’approcher d’elle et baiser ses mains, mais il me fallut renoncer à un tel effort.

— Geneviève, suppliai-je, vous serez à moi, n’est-ce pas ?

— Oui, je vous le jure.

— Ton amant, je serai ton amant… comme tu es bonne !

L’idée d’une joie si formidable comprimait les désirs de ma chair. À son tour elle m’implora :

— Tu ne verras plus ma sœur ?

— Ah ! tu sais…

— Oui, j’ai deviné… elle ne se cachait pas de moi, elle est jalouse… tu ne la verras plus ?

— Non, jamais.

— Tu as d’autres maîtresses ?

— Oui.

— Tu vas rompre ?

— Oui, je te le promets.

Il n’y avait plus rien entre nous, c’était notre amour passé qui se continuait et réclamait son dénouement logique. C’était notre bonheur de jadis. J’en reconnus la sensation ineffable, si différente de toutes celles que j’avais éprouvées depuis lors, sensation de pureté, de plénitude, de confiance.

Elle tira de son corsage l’anneau d’or que je lui avais donné.