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Page:Leblanc - L'Enthousiasme, 1901.djvu/15

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L’ENTHOUSIASME

donné tant de preuves de son amour ? Ne céda-t-elle point quelquefois au souci de paraître une de ces créatures de dévouement, minutieuses, infatigables, promptes à s’alarmer et prêtes à s’immoler, que l’on propose comme modèles aux jeunes épouses ? L’idée que l’on sera loué si on fait telle chose ou blâmé si on ne la fait pas, détermine autant que l’instinct qui porte à faire cette chose. Et dans sa volonté de me nourrir, par exemple, qui aurait pu établir la part de la maternité, et celle…

Oh ! mère chérie, pardon d’un tel blasphème ! J’ai subi si lourdement, à travers toi, le pouvoir de cette force qui l’écrasait, que je me figure en découvrir l’influence jusqu’au fond de tes plus nobles sentiments. Tu m’as permis de te juger librement en ces pages écrites pour nous deux et sur ta prière. Ne m’en veux pas si je me trompe. La passion ne m’aveuglera point, je te le jure, quand il s’agira d’avouer mes fautes.

Et puis le mieux n’est-il pas de sourire de ces misères ? Rappelle-toi ton plaisir lorsque tu suivais la rue principale, an enfant au bout de chaque bras, et que voltigeait autour de toi l’estime de toute une ville. Les regards bienveillants tombaient des fenêtres et jaillissaient de l’ombre des magasins. Un cortège de murmures favorables nous accompagnait. C’était exquis. Moi-même, par contre-coup, j’en éprouvais l’impression, celle, n’est-ce pas, d’un bain tiède et voluptueux. Je soupirais d’aise. J’étais bien.