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Page:Leblanc - L'Enthousiasme, 1901.djvu/154

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L’ENTHOUSIASME

ma révolte contre ces adversaires invisibles et redoutables, j’en arrivais à m’exprimer comme mère et comme Geneviève : « On m’espionne, on me poursuit, on me barre le chemin, » et, comme elles, je ne pouvais me défendre d’un sentiment de peur.

Un jour Claire m’appela.

— Je viens de Saint-Jore.

— Tu l’as rencontrée !

Tous mes scrupules se dissipaient. Je lui eusse confié toute l’histoire de mon amour pour obtenir d’elle un mot de consolation.

— Oui, répondit Claire, je l’ai rencontrée près de la poste.

— Que t’a-t-elle dit ?

— Elle ne m’a presque rien dit, elle pouvait à peine parler, elle m’a embrassée seulement, je crois qu’elle pleurait.

— Oui, fis-je convaincu, je suis sûr qu’elle pleurait.

Ce fut entre nous un sujet de conversation auquel nous revînmes souvent, sinon par propos directs, du moins par allusions.

— On ne veut pas que je sois heureux, Claire… Figure-toi que le bonheur était là, sous ma main, que j’allais le prendre et qu’on me l’a enlevé.

— Eh ! tu le reprendras.

— Non, c’est fini, je n’espère plus rien.

— Alors tu te résignes ?

— Moi, jamais !