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Page:Leblanc - L'Enthousiasme, 1901.djvu/251

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L’ENTHOUSIASME

les réserves de persuasion et de tendresse que j’avais accumulées dans la solitude.

— Tu veux bien ! murmurai-je, que de bonheur j’ai perdu en ne le devinant pas plus tôt ! Aurais-tu voulu, il y a deux mois ?

— Non.

— Ah ! tant mieux.

Cette fois le silence nous rapprecha, et ce fut comme la fin de notre vie ancienne et le début de notre vie nouvelle. Mon cœur trembla d’émotion.

— Je t’aime, Geneviève.

Vraiment cet aveu fut le premier. Nos lèvres se joignirent : c’était la première fois. Avide de sa chair inconnue, je m’abandonnai à mon désir. Elle me supplia :

— Pas ici, Pascal, plus tard, quand nous serons réunis.

— Oui, cela vaut mieux, tu es ma fiancée, je ne t’ai jamais eue, et ce sera la nuit de nos noces. Ah ! tu ne sais pas la joie que tu me causes en te refusant pour cette raison. La nuit de nos noces, Geneviève, ce sera là-bas, bientôt.

Je lui décrivis notre maison de Lucéram, nos meubles, notre jardin, nos arbres. Elle me demanda quelques changements dans la distribution des pièces. J’y consentis. Quel délice de rire !

— Nous rirons souvent, mon aimée, nous en aurons le droit… nous avons si peu ri et tellement pleuré !

Une cloche sonna la fermeture du dépôt.