Page:Leblanc - Le Cercle rouge, paru dans Le Journal, 1916-1917.djvu/156

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gagné à son tour par une telle assurance. Allez, c’est une bonne action. Mais soyez prudente…

Les deux détectives s’étaient rapprochée.

— Nous attendons vos ordres, monsieur Lamar.

Max parut hésiter.

— C’est très ennuyeux, dit-il, que vous soyez chargés de cette affaire. Moi, je comptais vous employer contre Sam Smiling, qui a failli m’assassiner cette nuit. Gordon ne se doute de rien, il restera dans ses rochers, s’y croyant à l’abri. Remettons à plus tard son arrestation. Occupons-nous d’abord de Sam. Voilà une capture qui en vaut la peine !

— Nous avons des menottes pour l’avocat Gordon et non pour le cordonnier Sam Smiling, aujourd’hui, répondit Jacob. Les ordres du chef sont formels. Gordon d’abord, l’autre ensuite.

Max Lamar n’insista pas.

— Mais savez-vous exactement où est la retraite de Gordon ?

— Parfaitement, dit Boyles, nous avons sa photographie et celle de la cabane où il s’est réfugié.

Pendant qu’il montrait les documents à Max Lamar, Florence Travis, d’un coup d’œil furtif, les regardait également.

— Voilà qui me sera très utile, pensa-t-elle. Je sais maintenant tout ce qu’il me fallait savoir.

Et, laissant là Mary et le groupe des trois hommes, qui discutaient encore, elle prit sa course vers la falaise.

Instinctivement, elle suivit le chemin par lequel étaient passés les acteurs du terrible drame de la nuit précédente.

— Arriverai-je avant les deux détectives ? se demandait-elle. Ah ! quelle joie si je pouvais sauver cet homme qui a sauvé Max…

Elle grimpait, toujours de plus en plus alerte.

Parvenue à la pointe d’un rocher, elle se retourna et aperçut les deux policiers qui, conduits par un jeune guide, s’avançaient dans sa direction.

— Il n’y a pas un instant à perdre !

Elle reprit sa course et, après de nombreux détours, elle arriva en face d’une cabane fermée qui semblait déserte.

— C’est bien cette masure, pensa-t-elle, que j’ai vue tout à l’heure, représentée sur la photographie.

Elle essaya d’ouvrir la porte qui résista.

Faisant alors le tour de la cabane, elle se rendit compte que la fenêtre de derrière, très basse, était entrebâillée.

Sans hésitation, elle l’escalada et se trouva dans une petite pièce dont le seul ameublement consistait en un grabat misérable et une table boiteuse sur laquelle une lampe était posée…

Il n’y avait personne dans cette pièce.

Elle franchit alors une petite porte qui communiquait avec une autre pièce étroite et sombre.

Comme elle y pénétrait, un homme se dressa devant elle. Elle le reconnut aussitôt.

— Monsieur Gordon, s’écria-t-elle avant même qu’il eût ouvert la bouche, la police vous cherche. Elle est à deux pas.

La figure de Gordon exprima un indicible effroi.

— Hâtez-vous de fuir ! Je viens vous donner ce conseil de la part de l’homme que vous avez sauvé cette nuit ! continua Florence très vite.

— Lui !

— Lui-même ! Mais ne perdez pas un instant. Sautez par la fenêtre. Sauvez-vous à travers les rochers. Pendant ce temps, je retiendrai les policiers ici jusqu’à ce que vous soyez en sûreté. Allez ! allez ! je vous en conjure !

Florence avait saisi Gordon par le bras et l’entraînait vers la fenêtre.

À ce moment, des coups violents ébranlèrent la porte.