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Page:Leblanc - Les Lèvres jointes, paru dans Le Journal et La Lanterne, 1897-1901.djvu/34

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— Oh ! certaines bouches, presque toutes… quel trésor adorable ! quelle merveille que la soie tendre et humide de la peau, que le pli souple des coins ! Quelle œuvre délicate et troublante que cette éclosion de chair rouge dans la blancheur du visage et devant la blancheur des dents ! Quelle jolie fleur fraiche, fleur de la sensibilité, fleur de volupté, fleur du rire, fleur de la vie surtout ! Les yeux sont l’expression apparente de notre pensée, mais la bouche, c’est la vie visible de notre corps, c’est là que la vie, enfermée dans sa prison de chair et de muscles, jaillit et s’épanouit. Elle y remue, elle y vibre, elle y palpite, elle y joue comme un enfant. Et c’est aussi par là qu’elle s’exprime. Oh ! le manège délicieux des lèvres qui s’amusent avec les mots, qui avancent, reculent, s’arrondissent, se font grandes et petites pour se soumettre aux volontés de la parole ! Prendre une bouche, c’est jouir de tout cela, c’est ouvrir la porte somp-