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Page:Leblond - Leconte de Lisle, 1906, éd2.djvu/181

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la condition qu’ils n’imaginent point de rien bâtir à leur place, qu’ils fassent seulement place aux hommes d’avenir. Il faut que le terrain, libéré des débris du passé, reste vaste et pur pour que l’architecte y ait l’espace et l’inspiration de construire le temple de la Future Humanité :


Lorsque l’architecture, alphabet des vieux âges
Que chante le poète et commentent les sages,
Ne sera plus livrée en proie aux illettrés,
Nous relirons alors dans ses feuillets sacrés,
Et les enfants de Dieu, par une étude austère,
Rétabliront le sens de son vrai caractère,
Sur la haute montagne, assis dans sa beauté.
Blanche image du calme et de l’illimité,
Le temple harmonieux en qui le monde espère
Se dresse lentement à l’horizon prospère.
Dans son multiple essor à la synthèse uni,
Il régnera du sein de l’azur infini ;
Et, résumant pour tous une trinité sainte,
L’homme, le monde et Dieu, dans sa mystique enceinte.
Chantera, divin texte et sublime missel,
Dans le concert de Pan le Verbe universel !


L’unanimité de ces poèmes révèle chez Leconte de Lisle le plus courageux optimisme, le plus fervent souci de l’avenir et d’un avenir meilleur où s’éploiera sur terre comme un nouvel Éden. Toutefois, il ne faut pas croire que cet optimisme fût absolument serein et confiant, que le poète ne soupçonnât point la présence du Mal ni n’en redoutât les victoires. Les Épis prouve, avec de la magnificence, combien, malgré sa conviction que terrible est le Mal, que sans cesse durera sa lutte contre le Bien, son optimisme raisonné demeure courageux et inébranlable. Après les vicissitudes des combats, c’est le Bien qui doit l’emporter, l’emporte. Et par