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Page:Leblond - Leconte de Lisle, 1906, éd2.djvu/199

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plus pure, la noblesse des accents purifiée de toute gangue ordurière : faisceau de lumineuses idéologies, appels prophétiques à la Raison et au Droit, trophées de la piété rendue aux grands précurseurs humanitaires, appareil religieux de la pensée, somptueuse gravité des évocations libertaires et fraternitaires. Aux revendications du siècle passé s’unissait, entresoutenant leurs audaces et leurs forces, celles du socialisme naissant, nettes, impérieuses : guerre à la richesse et au salariat.

Le premier de ces articles est du 24 octobre 1846 :


LA JUSTICE ET LE DROIT

S’il est une foi inébranlablement fixée au cœur des nations comme au cœur des hommes ; s’il est un idéal sans cesse visible aux yeux de tous et de chacun, à coup sûr cette foi concerne la justice, cet idéal est le triomphe du droit social sur la terre. La justice et le droit ? préoccupation sacrée, éternelles idoles des grands cœurs ! De Budha à Jésus, de Confucius à Socrate, d’Arnaud de Brescia à J. Huss, de J.-Jacques à la Convention nationale, dans le cours tumultueux des siècles, au plus fort des luttes, des doutes et de l’ignorance des peuples, des voix puissantes, des cœurs inspirés ont prophétisé le règne de la justice et du droit, mots sacrés qui contiennent l’avenir. Budha et Jésus ont affranchi l’homme devant Dieu ; Confucius et Socrate ont révélé sa dignité morale ; Arnaud de Brescia et Jean Huss sont morts du supplice réservé par Rome aux précurseurs de la fraternité ; J.-Jacques et la Convention nationale ont décrété la liberté du monde. Leurs voix se sont tues, leurs cœurs ont cessé de battre ; mais les principes éternels qui vivifiaient leurs génies se sont réfugiés dans d’autres cœurs…