Page:Leblond - Leconte de Lisle, 1906, éd2.djvu/334

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l’origine, de ressources bien supérieures à celles des autres nations européennes en Orient, élevée par Dupleix et Bussy au rang de puissance continentale, cessait d’exister après avoir sacrifié tour à tour à ses jalousies misérables, à ses rancunes, à ses terreurs puériles, à son incapacité profonde, les grands hommes qui l’avaient illustrée. Elle entraînait dans sa chute une part considérable de la fortune publique, ruinant ses actionnaires non moins que ses créanciers et ne pouvant même se rendre compte de la disparition des sommes immenses versées dans ses caisses de 1742 à 1754.


En opposition à l’éloge de Dupleix, une partie, non moins considérable, est consacrée au récit des témérités et des malheurs de Lally-Tollendal dont l’historien condamne sévèrement l’ignorance, l’insolence et l’inhabileté criminelles. Elle se termine par ces lignes pesantes qui commentent la décapitation de Lally :


De nos jours on qualifie volontiers d’acte inique le coup qui l’a frappé. Cependant il faut opter entre la responsabilité humaine et l’enchaînement fatal des faits historiques. Tout ordre social n’est-il pas fondé d’ailleurs sur le dogme sanglant de l’expiation ? Si l’incapacité avérée de Lally atténuait ses irréparables erreurs, c’était aux directeurs de la Compagnie, aux contrôleurs généraux, à Louis XV lui-même d’expier la ruine de cent familles et l’anéantissement de l’Inde française. S’ils étaient innocents, nul châtiment n’a été plus légitime et plus mérité que le sien ; si tels étaient les vrais traîtres, que le sang de ce malheureux retombe sur ses juges !


Le fragment précédent sur la Compagnie des Indes n’est pas moins important. Leconte de Lisle