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Page:Leconte de Lisle - Eschyle (Lemerre, 1872).djvu/133

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le sang répandu de sa mère ? Comment ta patrie, soumise par ta violence, te sera-t-elle attachée jamais ? Moi, à la vérité, j’engraisserai cette terre de mon sang, divinateur enseveli dans un sol ennemi. Nous combattrons, et j’espère que ma mort ne sera pas honteuse. – Ainsi parle le Divinateur, en agitant son bouclier d’airain d’une rondeur parfaite et qui ne porte aucun emblème dans le cercle. En effet, il ne veut point paraître le meilleur, mais il veut l’être. Les sages desseins naissent comme une moisson des profonds sillons de son âme. Je te conseille de lui opposer des adversaires sages et vigilants. Il est à redouter, celui qui craint les Dieux.


Étéoklès


C’est une mauvaise destinée que celle qui a fait d’un homme juste le compagnon d’hommes pervers. La pire des choses est d’avoir de mauvais compagnons ; on n’en recueille point de fruits, car le champ d’Atè n’en a point d’autres que la mort. En effet, quand un homme pieux monte sur une nef avec de vils matelots capables de tout oser, il périt avec cette race d’hommes impies ; ou, quand un homme juste vit au milieu de citoyens inhospitaliers et oubliant les Dieux, il est enveloppé, innocent, dans le même filet, et il tombe, frappé comme le reste, sous le fouet d’un Dieu. Tel ce divinateur, fils d’Oikleus, homme prudent, juste, brave et pieux, et grand prophète, a été mêlé contre son gré à ces hommes impies et injurieux ; mais quand ils reprendront leur longue route, il fuira aussi, et, par la volonté de Zeus, il sera entraîné comme eux. Mais j’espère qu’il n’assiégera point nos portes, non par lâcheté, mais sachant qu’il doit périr dans le combat, si les oracles de Loxias sont