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Page:Leconte de Lisle - Premières Poésies et Lettres intimes, 1902.djvu/220

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et lettres intimes


Comme deux souffles purs au vallon solitaire,
Qui confondent leur plainte et leur essor léger,
Deux fleurs que les destins ont uni sur la terre
Et qui rendent au ciel un parfum passager ;

Vous passerez sans gloire et non pas sans ivresse :
Pour sourire et pleurer il faut joie et douleur,
Et vous avez connu l’amour et la jeunesse,
Ô vous, sourire et pleur !

La vie est un chemin ou lumineux ou sombre :
Force ou fragilité,
Allez donc dans Fespoir et dans l’humilité,
Le sourire est rayon et la tristesse est ombre !

L’oiseau dont le printemps fait éclater la voix,
Qui voltige, inconstant, au parfumé feuillage,
Laisse-t-il un écho ? la brise dans les bois,
Trace de son passage ?

Non ; l’accent de l’oiseau naît, s’élance et se perd ;
La brise aux ailes fraîches
Ne fait que s’envoler et, sur les feuilles sèches,
Souffle le vieil hiver.

Allez donc, frêles chants de nos âmes pensives,
Qui nous êtes si doux ;
Allez mourir plus loin, ô notes fugitives.
Feuilles, envolez-vous !