Aller au contenu

Page:Leconte de Lisle - Premières Poésies et Lettres intimes, 1902.djvu/55

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
22
premières poésies

rencontrant un poète qui veut bien me communiquer ses douces pensées ? Comment ne serais-je pas reconnaissant de ce qu’il me croit capable de les comprendre ? Vous le savez bien, mon Ami, je ne peux pas vous oublier. Avez-vous donc cru que l’aveu que je vous fis, dans ma dernière lettre, n’était qu’une fiction ? Avez-vous donc pris Mlle C. Beamish pour une création mienne ? Merci de vos éloges, mon Ami ; mais croyez-le, je n’invente pas aussi bien. L’artiste, ici, c’est Dieu. Sur ma conscience et sur mon honneur, il n’est rien de plus vrai.

L’amour doit être reconnaissant des louanges charmantes que vous lui adressez ; je vous remercie de l’avis harmonieux que vous me donnez ; mais, hélas ! l’âme qui s’est blasée elle-même ne sent plus comme l’âme vierge de tout contact. À vous l’amour, mon Ami, c’est-à-dire toutes les illusions que la femme laisse flotter autour d’elle, comme un voile pudique ; à vous le don d’admirer, sans y toucher, la grâce externe et interne de cet être